Le plus gros challenge que doit relever l’Afrique postcoloniale afin de pouvoir renaître et de mieux imaginer ses possibilités d’avenir est de réexaminer les concepts, les idéologies et les approches scientifiques coloniales (ethnologie, anthropologie, muséologie, etc…). Pour cela, l’approche artistique semble assez intéressante en ceci que l’art ne surcharge pas l’intellect qui s’en approche, mais il séduit, émerveille, électrise et engage.

L’approche par l’art est prometteuse, car elle crée des imaginaires susceptibles d’engager de nouveaux élans porteurs d’énergies positives. Elle engage le questionnement sur les significations, les pourquoi et comment et sur la portée potentielle des gestes et des créations.  Comme nous l’enseigne Mbog Bassong[1], l’art africain est expiateur, il aide la société à questionner et à travailler les traumatismes dont elle est victime. L’art traduit la manière dont les artistes sentent et vivent les tensions de la société et a donc vocation à corriger l’état mental de celle-ci afin qu’elle puisse s’épanouir et fleurir.

Reconnecter Les Objets, Les Savoirs Et/Avec Les Sujets

Une Exposition / Workshop  » qui se tien 18 au 28 février 2023 à l’AFC et au musée des civilisations de Dschang.

C’est partant de ces postulats que l’exposition « l’Exposition Reconnect » du 18 au 28 février 2023 à Dschang, se propose d’être un espace d’enchevêtrement des savoirs, des arts, des sciences et des cultures dans une perspective cyclique qui connecte le passé et crée des imaginaires d’avenir à partir des dynamiques du présent.

En tant qu’espace de rencontre et de performances scientifiques, artistiques et culturelles, l’occasion est donnée aux acteurs locaux de développer eux-mêmes leurs intelligences et propositions prospectives sur les questions de restitution des composantes matérielles et immatérielle de leur culture, retenues dans les musées en Occident. Il s’agit aussi de penser la reconnexion à ce patrimoine et la réinvention d’un nouveau rapport avec ces artefacts et, avec les personnes qui l’activent.

Cette exposition/workshop est ainsi favorable à l’idée et aux pratiques de conception, de conservation, de transmission et de monstration/pérennisation des savoirs patrimoniaux contextualisés.

MONUMENT NKOUP lors des Funérailles en Pays Bamiliké - ©Sidoine Mbogni

MONUMENT NKOUP lors des Funérailles en Pays Bamiliké – ©Sidoine Yonta

Exposition Reconnect…

Maintenir la Flamme – féconder les connaissances actuelles – Générer les bourgeons de la culture du future

Instruments de danse des forgerons - ©Sidoine Mbogni

Instruments de danse des forgerons – ©Sidoine Yonta

Dans une démarche culturellement enracinée, cette « Exposition Reconnect » se veut être un moment de co-construction d’un imaginaire grassfields et camerounais aux multiples occurrences, capable de décentrer le débat autour des œuvres d’« arts » et des expressions culturelles fondamentalement fonctionnelles. Il s’agit d’épouser les propos du compositeur Gustav Mahler pour qui, « la tradition c’est maintenir la flamme, pas adorer les cendres »[2], pour  faire de cette rencontre une vitrine à travers laquelle s’entremêlent traditions ancestrales et traditions contemporaine, à travers laquelle se fécondent les sciences  endogènes et les connaissances actuelles pour générer les embryons et les bourgeons de la culture du futur… Pour cette Afrique restée muette ou presque, orpheline d’elle-même, de ses sciences et de ses arts, de ses avant-gardes et de ses classiques[3].

L’objectif de cette rencontre (« Exposition Reconnect« ) est de montrer comment la polyphonie ou la plurivocalité peut créer et jeter les bases opérationnelles du changement social, ou plus exactement comment la pluralité des approches artistiques, les divergences théoriques et conceptuelles, les écarts et les frottements peuvent être source de transformations et de changements autour d’un idéal de perception, de transmission et d’imagination du présent et de l’avenir. À partir des exemples tirés des grassfields et à travers des expressions artistiques et culturelles plurielles, il est question de montrer les formes de résilience que l’Afrique a développée pour ne pas périr culturellement. A partir des flammes du passé, se réchauffent et se créent de nouveaux imaginaires dans le milieu artistique et culturel grassfield.

Se Defaire des Préjugés du Passé…

Lors de l’Exposition Reconnect

Cette « Exposition Reconnect » (rencontre) s’inscrit dans la logique de se défaire des interprétations, des préjugés, des descriptions, des constructions mythiques que l’Occident colonisateur a bâtis de l’Afrique en général et de ses cultures en particulier, afin qu’elle puisse dire elle-même, par elle-même et pour elle-même ce qu’elle est. Cela implique le recours aux savoirs anciens, aux pratiques spirituelles, aux expressions culturelles, aux marqueurs de sens et à son rapport à son patrimoine historique, souvent fortement transformé et engagé dans des échanges avec une société en pleine ébullition.

À travers la pluri-vocalité artistique, il s’agit de laisser les acteurs endogènes dire ce qu’ils pensent de la reconnexion à leur patrimoine et comment ils envisagent leur devenir à travers leurs créations. Se proposant d’être une courroie de transmission d’informations intergénérationnelles, mais aussi multidimensionnelles, cette rencontre avec les artistes, les artisans, les chercheurs, les lieux patrimoniaux, les lieux de création et les détenteurs des savoirs anciens, est susceptible de féconder les énergies et de proposer des ouvertures vers un futur qui soit en accord avec les valeurs d’antan, mais aussi avec les aspirations des temps présents.

Jeunes batteurs lors d'une danse traditionnelle en pays bamiliké - ©Sidoine Mbogni

Jeunes batteurs lors d’une danse traditionnelle en pays bamiliké – ©Sidoine Yonta

Votre Invitation…

Venez découvrir la re-connection en action !

par Radio Yemba

Echantillon d'oeuvre présente à l'exposition reconnect - ©Marios Kenfack

Echantillon d’oeuvre présente à l’exposition reconnect – ©Marios Kenfack

Chercheurs internationals participants à l'exposition reconnect

Chercheurs internationals participants à l’exposition reconnect

Artistes Participant à l'exposition reconnect

Artistes Participant à l’exposition reconnect

Seance de travail au Club Art Kid Lessa'a 3

Seance de travail au Club Art Kid Lessa’a – Travaux à découvrir lors de l’Exposition Reconnect

[1] https://www.youtube.com/watch?v=FTb24V55G64 et Sociologie africaine : paradigme,  valeur et communication

[2] Cette citation  de Gustav Mahler  alors directeur de l’opéra de Vienne dérive de celle originelle de Jean Jaurès “Tradition ist nicht die Anbetung der Asche, sondern die Weitergabe des Feuers. »  https://www.wienerzeitung.at/nachrichten/reflexionen/geschichten/897102-Irrwege-einer-Metapher.html, 

[3]  L’ancêtre Iritisen énonçait déjà il y a 4000 ans, les premiers principes théoriques de l’esthétique, avant Platon et compagnie. Article de Obenga Théophile (1994), « La stèle d’Iritisen ou le premier traité d’esthétique de l’humanité », ANKH n 03